Andalousie, dernier soir à Grenade, valeurs de l’amitié …
Katia me retrouve donc, et nous partons immédiatement rejoindre Yolande et Pierre qui nous attendent au salon de thé .
J’ai insisté dans l’article précédent sur l’intérêt des jardins (petits et grands = patios et « carmenes ») dans les hauts de Grenade . Il en est de même dans l’intérieur des maisons, dont beaucoup conservent encore des vestiges raffinés évoquant d’autres jardins faits de colonnes aux magnifiques chapiteaux, d’azulejos et de dentelles de stucs, de plafonds en marqueterie mudéjar qui rappellent tout le monde arabe grenadin du 14ème siècle : rapport intime entre l’extérieur et l’intérieur, le visible et l’invisible, les jeux de l’eau et de la terre, de l’ombre et du soleil, art de vivre et de penser qui appartient aussi au visage intime de l’Andalousie .
Il en est ainsi de ce charmant salon de thé, où l’on se croirait davantage à Fès ou Rabat qu’en Europe méridionale tant la restauration des stucs et le décor mudéjar y sont réussis, dans une ambiance intime et chaleureuse … (photo Alain MARC)
L’importance des senteurs se retrouve aussi dans le choix des thés aux noms poétiques que nous goûtons, nous emmenant plus loin encore dans les rêves de l’orient .
Katia nous raconte le succès de son livre présenté à la presse et à la télévision lors d’une soirée mémorable suivie d’une conférence, où tous ses amis de la montagne étaient venus l’encourager, sans oublier le soutien de ses professeurs, du représentant de l’UNESCO et de tous les notables de la ville .
Pierre ne cesse de dessiner . Il capte rapidement ces deux andalouses qui devisent dans un coin … (aquarelle Pierre NAVA)
Et puis il me dessine quand je tend l’oreille pour mieux suivre la conversation, car de la musique flamenca s’est rajoutée au brouhaha de la salle tandis que le salon de thé ressemble un instant plus à une « tasca » ou une « bodega » qu’ un paisible lieu de conversations où l’on savoure des thés rares … (aquarelle Pierre NAVA)
Yolande dessine aussi, et je retrouve dans ses dessins l’ambiance de ceux de Marrakech ou d’Essaouira . … Katia est au milieu du croquis, pensive ou attentive, contemplant peut-être les deux superbes théières qui n’en demandaient pas tant ! (aquarelle Yolande GERDIL)
Cette jeune ethnologue porte en elle l’Andalousie des Alpujarras et ce n’est pas pour rien que son ouvrage sur les contes et légendes de ces montagnes magiques fait déjà référence . Ses études continuent à Grenade dans un autre passionnant domaine, celui des arts graphiques où sa curiosité de sociologue cette fois, l’amène à explorer le monde peu connu des grapheurs urbains qui s’expriment sur les murs de la cité . C’est ce qu’elle nous fait découvrir quelques instants plus tard lorsque nous redescendons vers la Grenade bruyante et moderne qui nous attends dans la basse ville …
Un pont entre les anciennes calligraphies et un monde contemporain où le sens de la communication, de l’image et de l’écriture est en perpétuelle mutation ?
Ce « tag » est plus bouleversant encore parce que découvert la nuit en plein cœur de l’Albacin . Je note le texte écrit à droite du portrait : « Un pajaro sale a buscar la inocencia, y vuelve muerto bajo sus alas … Campanas en los solitarios de la noche » (« Un oiseau part chercher l’innocence et revient mort sous ses ailes . … Carillons aux isolés de la nuit ») . Je songe à Lorca, à Manuel de Falla (meurti jusqu’au fond de son âme à l’annonce de l’exécution de Lorca), à tellement d’autres … - Qui pourrait me dire ce que lui évoque ce texte ? Est-ce emprunté à un poème de Lorca ou d’un autre poète que je ne connais pas ? (photo Alain MARC)
Je laisse descendre Katia, Yolande et Pierre …
Moi, j’ai du mal à m’arracher aux murs blanchis pleins de mystères, je regarde les étoiles et j’écoute une dernière fois le chant secret de l’Albacin où je reviendrai encore saisir les perles de la terre accrochées aux pavés à présent silencieux de la cuesta Maria de la Miel . (photo Alain MARC) Bientôt, nous retrouvons l’ambiance bruyante et agitée du quartier des Bodegoncillos où nous faisons un vrai repas de tapas accompagnées d’un bon Montilla - Morilès avant de nous quitter . Demain matin nous prenons la route de Cordoue . Nous reviendrons ici fin avril / début mai pour retrouver aussi l’Alhambra (« La Rouge ») que nous n’avons pas eu le temps de revoir cette fois, et si nous le pouvons d’aller aussi faire un tour du côté des quartiers moins connus du Mauror et de la Juderia .
Dernière photo prise à Grenade dans la bodega où nous nous sommes restaurés . Sous les « serranos » alignés, le grand miroir renvoie l’image insaisissable et pourtant bien réelle du temps qui passe et d’une image qui s’efface : celle de l’existence même, et je la regarde défiler comme sur un écran sans même pouvoir boire ce verre de Montilla que j’ai à la main … (photo Katia FERSING)
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