Aquarelles de montagne et de vol libre (A) ...
J’ai toujours rêvé de voler …
J’ai toujours voulu aller jusqu’au bout de mes désirs de pure liberté dans les trois dimensions de l’espace, d’élévation au dessus du monde, par tous les moyens possibles pourvu qu’ils correspondent à un accomplissement …
Je pensais dès ma petite enfance qu’il était possible d’associer la mémoire des instants vécus dans ces moments exceptionnels aux images que je pourrais en retirer plus tard à partir de mes propres souvenirs à travers la peinture (figurative ou abstraite) que cette expérience pourrait m’inspirer .
J’ai raconté la réalisation de l’un de ces rêves dans deux articles récents : vous pouvez les revoir ou les découvrir, en visionner le film et en examiner les aquarelles en cliquant ici et ici .
Étude d’un vautour fauve en vol . Causse Méjean ce jeudi 27 juillet 2006 . L’oiseau reste pour moi l’archétype de la plus belle réussite naturelle en matière de vol, particulièrement en ce qui concerne les voiliers … (Détail aquarelle page carnet de stages . Alain MARC 22 x 32 cm 2006)
Mon enfance était nourrie de récits évoquant les exploits liés à l’aviation alliée associée à la résistance, racontés en famille par mes parents et leurs amis maquisards au lendemain de la dernière grande guerre . Chacun avait participé à ces sauvetages de nuit pour rapatrier un pilote ou aux parachutages de munitions .
Tous les jours, de la maison de ma grand-mère paternelle, j’étais fasciné par la voltige des Stampes évoluant au dessus du village : ils passaient en rase-mottes au dessus de la maison, reprenant rapidement de l’altitude au dessus du Tarn et virevoltaient avant d’atterrir sur le petit aérodrome de Gaillac d’où ils avaient décollés . En même temps j’étais en admiration devant le carnet de tranchée de mon grand-père maternel qui resta malheureusement pour lui et pour nous inachevé (comme sa vie !) au cours de la grande guerre précédente, et ceux de mon père remplis de croquis à l’aquarelle et à l’encre de Chine .
C’était en 1966 au Centre régional de parachutisme Claude Lahille de Gaillac : j’y réalisais mes premiers sauts en parachute et venais de concrétiser un rêve qui était de voir mon village paternel depuis le ciel et d'appréhender l‘espace dans une nouvelle dimension … À l’endroit même où je regardais enfant les Stampes survoler la maison de ma grand-mère, et les pilotes venir saluer mon père !
Les années sont passées …
Le parachutisme me paraissait trop contraignant, dépendant d’une infrastructure lourde, pas assez individualiste ni conforme à mon désir de liberté même s'il m'avait beaucoup apporté .
Dans les années soixante j’allais souvent voir les « Mantas », ailes de Rogallo transformées en deltaplanes et leurs intrépides pilotes décoller et planer devant les falaises de Saint-Antonnin-Noble-Val . Époque aussi de mes premières escalades sur ces mêmes parois . Mais le delta n’offrait pas la sécurité qu’il offrira plus tard et l’engin me paraissait encore encombrant et peu manoeuvrant . Mes tentatives dans ce domaine ne furent guère réussies, et je fis même une chute mémorable mais sans gravité avec un engin peu fiable que je m’étais moi-même fabriqué !
En attendant, je découvris l’alpinisme et la haute montagne vers lesquels mon regard se tourne toujours … J’en retirai de nombreuses aquarelles comme celles de la collection Mythra qui m’avaient été commandée par cet éditeur dans les années 1970 .
Pourtant, le rêve d'un vol absolu, en totale liberté, me poursuivait .
La nuit du 16 au 17 juin 1979 j'écrivis dans mon journal de rêves : " ... Je plongeais dans la vallée en déployant mes bras . Il faisait nuit . Je pris rapidement de l'altitude pour atteindre 800 à 1000m au dessus de la maisonnette . En bas la route, les rochers, les champs, la rivière, étaient très beaux sous les étoiles et la lune qui les éclairaient . Pour redescendre je devais me forcer, basculer tête la première, mettre les bras le long de mon corps pour enfin tomber brutalement jusqu'à quelques mètres au dessus de l'Aveyron ."
Mais ce n’est que 5 ans plus tard qu’apprenant à la télévision que des parachutistes venaient de décoller d’une paroi des Alpes que je me lançais aussi dans l’aventure avec d’abord des voiles de saut (« Surfair », « Strato-Cloud »), puis mon premier parapente, une "Randonneuse" qui dépassait tout juste les deux de finesse !
Extrait d’une page du carnet de vol . J’avais dessiné André en train de plier sa voile au moment où j’atterrissais près de lui un soir d’automne au crépuscule, loin de toute zone habitée : nous n’étions en ce temps-là qu’une poignée dans la région à pratiquer le parapente, surtout en escalade et randonnée . (Extrait carnet de vols . Alain MARC 1986)
Je vous raconterai une autre fois cette exaltante époque où des Pyrénées aux Alpes, de la dune du Pilat à l’Aveyron, j’ai eu la chance de côtoyer des pionniers formidables et de partager avec eux les débuts de la passionnante aventure de l’arrivée du parapente dans le vol libre .
Pour aujourd’hui je me limite à vous offrir ces deux extraits de mon carnet de vol illustrés à l’aquarelle . Ils datent du milieu des années 80, lorsque nous avions la chance d’ouvrir des « premières » depuis toutes les hauteurs qui nous paraissaient dignes d’intérêt .
Inoubliable épopée !
Nous partions le parapente sur le dos, et plongions dans le vide sans savoir toujours où nous allions atterrir … Que d’émotions, (ici dans les Gorges du Tarn où nous n'avions pour seuls repaires d'atterrissage que les grèves étroites longeant son long ruban argenté), et que de souvenirs dans lesquels nous côtoyons des oiseaux aussi majestueux et beaux que les aigles et les vautours, qui parfois indifférents parfois curieux, croisaient notre trajectoire ou quelques instants nous accompagnaient … (Extrait carnet de vols . Alain MARC 1988)