« …Je n’arrête pas de peindre depuis le stage, tu m’as donné une pêche d’enfer ! »
Voilà ce que me dit Gilles à qui je consacre cette série de billets spéciaux
"fêtes de fin d'année", en m’envoyant un intéressant carnet réalisé juste après
le stage du Jura Oriental été,
et cela me touche d’autant plus en cette fin d’année que nos pensées à son encontre l’aideront à transmettre de la force à des êtres chers qui en ont besoin près de lui en ce moment.
- Car n’est-ce pas la vocation de l’art pour tout créateur, que de produire de la force apte à lui revenir décuplée sous la forme d’énergie à travers le regard et
les pensées de celles et ceux qui contemplent le produit son art ?
Je pense que c’est là une question fondamentale du rôle de l’acte créatif, par-delà même celui de l’art (que ce mot s’écrive avec un petit ou un grand
« A ») : celui de produire une énergie capable de nous transcender, de nous revenir au moment où nous nous y attendons parfois le moins pour nous grandir, nous aider, et aider nos
proches si nécessaire.
Je ne cesserai d’ailleurs jamais de repenser à ce que me disait mon père : « - Tant que tu auras la peinture tu ne seras jamais seul, face à l’adversité tu
auras la peinture ! »
Et Gilles l’expression de ses carnets, sobres, dépouillés mais oh combien « présents », qu’il nous appartient d’encourager, d’accompagner, de suivre dans
les traits et la couleur jusqu’à la taillanderie de Nans-Sous-Saint-Anne par exemple : voilà une ferme - atelier du XIX ème siècle spécialisée dans la
fabrication de faux et d’outils taillants de toutes sortes, qui fermée en 1969 est devenue un écomusée superbe, conservant outillage et machines en parfait état de fonctionnement.
Roues hydrauliques, martinets et soufflets y fonctionnement encore au gré des visites et Gilles - Simon VERMOT les saisit, crayons, aquarelles et pinceaux
traduisant la force symbolique de toute l’épopée liée à l’histoire des lieux. Il le fait avec la rigueur et la curiosité d’un d’Alembert ou la perspicacité d’un Diderot .
Mieux : il plonge dans la mémoire vivante de cet atelier, il l‘interroge, il en retrouve l‘esprit.
Gilles dessine et peint principalement sur les pages de droite, réduisant son propos pictural à l’essentiel, se concentrant sur un sujet précis, sans texte ni décor
superflu. Les pages de gauche sont réservées au texte ou à d’anciennes photos sépia, et le tout en dit bien plus long qu’un long discours.
Contemplez les extraits ci-dessous retirés de ce très intéressant carnet, et n’hésitez pas à lui laisser des commentaires, je sais qu’ils feront plus que plaisir à
Gilles : ils l’aideront à puiser dans vos mots et encouragements une énergie qu’il pourra transmettre à qui en a bien plus besoin que lui !
La source du Lison toute proche de cet atelier résume bien ce qu’est ici l’eau jaillissant de la roche porteuse de vie et source d’énergie : une bénédiction
au service de la nature et de l'homme.
L’atelier vu de l’extérieur a l’aspect des fermes d’ici : une architecture robuste, vaste et fonctionnelle faite pour résister à l’assaut de longs
hivers.
Vue du côté « bief » la taillanderie nous dévoile son principal secret :
la machinerie qui à partir des roues à aubes va faire fonctionner tout le reste.
Les roues à aubes qui à l’intérieur font fonctionner les martinets : ingénieux et
fonctionnel, terriblement efficace, …et assourdissant !
Élément central et incontournable de la taillanderie, la forge est une « petite maison » dans la maison : c’est dans son foyer que l’âme des faux
et autres outils va naître.
Inséparable de la forge, l’enclume résonne encore des coups de marteau sur le métal
rougi et malléable…
Quand on dit que les vieux outils ont une personnalité et une âme, c’est parce que leur mémoire nous parle,
et le carnettiste mieux que personne va à la rencontre des histoires qu’il vont nous raconter…
On voit bien ici comment Gilles a articulé son carnet : à droite aquarelles,
croquis et illustrations (peu de textes), à gauche photos anciennes sépia ou monochrome et texte créant le lien avec la page de droite : un carnet qui se parcourt comme un livre rare et beau
!