"Vendangeuses" (vue partielle) , Gorges du Tarn 2005 : Croquis aquarellé 21 x 29,7 cm sur papier Lukas grain satiné 150g/m2 Réalisation : croquis aquarellé au crayon graphite 2B, peinture au pinceau à réservoir "Pentel", sans graphisme de rehauts . Couleurs utilisées : rose permanent, terre de Sienne brûlée, jaune de Naples, bleus outremer clair et de cobalt , terre d'ombre brûlée . Temps total de réalisation : environ 25 mn avec coupures pour déplacements et changements de points de vue .
Nous sommes le 15 octobre 2005 : je décide de raconter ma vie d'aquarelliste au jour le jour (enfin, chaque fois que j'aurai la possibilité de la mettre en ligne !) .
Ce que je pense, ce que je ressens face à ce monde immense, impitoyable, en perpétuel changement, prêt à nous engloutir si nous n'avons de repères à défendre, de chemins à tracer, de valeurs à partager . peut constituer le fil conducteur de fructueux échanges ...
- Et ce n'est pas dans le monde de l'art que c'est le plus facile !
Non, bien au contraire : univers inextricable, comparable à un océan abyssal et ténébreux où les créateurs les plus talentueux, les œuvres les plus lumineuses ne sont pas forcément toutes celles que les lois du marché ou les volontés de l'Institution voudraient nous imposer comme seules et uniques références, comme vecteurs exclusifs et incontournables des produits les plus élevés de la pensée .
Par exemple cette pseudo évaluation des expressions artistiques selon laquelle tel moyen est « mineur » tel autre « majeur », pour ne pas dire méprisable . - De quel droit ? N'a de sens selon mon point de vue que ce qui véhicule une authenticité, une simplicité, une force, une énergie profondes (même si elles peuvent se décliner sous des apparences bien plus complexes), dégagées des concepts purement intellectuels, des courants à la mode ou des influences sournoisement mercantiles .
En ce qui me concerne, il y a longtemps que tout à commencé . Au plus loin que je me souvienne (mémoire d'enfance où j'apprenais les rudiments du pinceau et de la mine graphite sur les genoux de mon père lui-même peintre et sculpteur avant même de savoir lire ou écrire), j'essayais de traduire ce que je voyais (et pensais) avec quelques traits, quelques couleurs, dans cette plénitude de liberté et de rigueur conjuguées qui se nomme « aquarelle » .
Aujourd'hui, je suis descendu dans les Gorges du Tarn avant qu'il ne pleuve ... Où plutôt à leur sortie, lorsqu'elles s'ouvrent pour laisser place à de riants coteaux en terrasses, accrochés aux pentes des causses de Sauveterre et Noir . Cette vallée est parsemée de balcons naturels où abondent cerisiers et mirabelliers, et où pousse la vigne produisant ce vin clair et fruité qui a pour nom « Côtes de Millau » . Ce n'est pas un immense cru tel que nos célébrités de Bourgogne ou du bordelais, mais il offre à la gorge et au palais ce que tant de bons vins de pays aimeraient posséder : authenticité du terroir, beauté de la robe, parfum du bouquet, finesse au goûter .
C'est le dernier jour des vendanges : dans le coteau tout le monde se presse, remontant et descendant les rangées, de cep en cep, remplissant seaux et paniers, en conjurant l'orage pour qu'il n'éclate pas car le ciel roule de lourds nuages gris emportés derrière les hautes falaises de calcaire par le vent d'autan .
Elle arrive enfin, la dépression annoncée !
Muriel est belle comme le jour .
Elle promène ses vingt ans de plants en rameaux, de grappes en grappes, et disparaît entre les sarments colorés .
Croquis, sourires, complicité, encore croquis ...
Je ne connais pas la vendangeuse et ne la reverrai jamais .
Quelques couleurs et le tour est joué .
C'était simple, vivifiant, vrai .
Demain je m'envole pour le Maroc ; j'ai un groupe à encadrer dans le cadre d'une aventure autour des carnets de voyages . C'est à partir de Marrakech que tout va se jouer .
À mon retour je vous raconterai ...