De « l’expérience parapente » à l’abstraction picturale …
Je vous avais laissé dans le dernier article au moment où j’essayais de prendre quelques photos à plusieurs centaines de mètres au dessus du sol accroché à mon parapente, vu les conditions ce n’était pas de tout repos !
J’ai relaté dans cet article ce qu’avait été cette expérience comme source d’inspiration d’une aquarelle abstraite, aux taches vives et colorées comme un feu d’artifice …
Mais revenons à mon ascension : je suis encore là-haut bien secoué par des turbulences au moment de prendre ces fameuses photos, et je n’ai pas pour l’instant l’esprit à imaginer ce que mon vol va m’inspirer comme nouvelle peinture .
La priorité est à la maîtrise de mon planeur de tissu qui me ballotte dans tous les sens en bordure de ce puissant thermique .
La nationale 88 est en train de tanguer … (photo Alain MARC)
Une fois l’appareil bien repris en main, je me remets face au vent météo et constate avec dépit en perdant l’ascendance (et pour cause, je ne veux pas partir avec elle qui se décale vers l’intérieur du plateau), que le vent vient soudain de se renforcer considérablement en changeant d’orientation .
Je suis tout simplement en train de reculer dans une dérive nord-ouest des moins recommandables ! C’est le vent d’autan qui est en train de « rentrer » en force, de se lever, certainement sur tout le midi toulousain .
Dessous, même s’ils sont vraiment minuscules, je vois tous les arbres s’agiter sous les rafales dans les haies, les bosquets et les forêts, et pas juste quelques-uns comme lorsque s’est déclenché mon ascenseur .
Hors, un aéronef c’est fait pour avancer, pas pour reculer !
Bien sûr je vole dans une masse d’air, « j’avance » par rapport à elle, mais l’ensemble me recule un peu vite à mon goût par rapport au sol :
- dois-je penser à aller me reposer ?
Après tout, il y a maintenant presque une heure et demie que je vole et il me faut gérer la situation avec le plus de sécurité possible . Je pousse sur l’accélérateur, tiens bien ma voile freinée au meilleur calage possible, et je décide même si j’ai perdu beaucoup d’altitude de faire mes 2 ou 3 photos et un petit bout de vidéo : au moins qu’il reste quelque chose de ce vol mémorable !
Elle n’a pas changé la vue vers l’est : celle-là au moins, j’ai eu le temps d’en faire plusieurs clichés ! (photo Alain MARC)
Acrobatique ! L’appareil à photos me glisse des doigts, mon pilotage « sellette » n’est pas des plus faciles, la voile part de dérapages en glissades et je me retrouve vent de dos, bien vers l’intérieur du causse, lorsque j’ai encore assez de hauteur pour repérer un champ dégagé et assez vaste pour limiter la casse « au cas où », (car les turbulences à l’approche du sol doivent pas mal tourbillonner) .
Il n’empêche, j’ai photos et vidéo, je suis impatient de voir ce qu’elles vont « donner », c’est sûr qu’on va voir qu’il y avait de la bousculade même si j’étais tout seul là-haut . … Et puis j’ai plein d’idées de peinture dans la tête !
Je vois un coin loin de tout obstacle, tout près d’un pâturage où broutent tranquillement des vaches (d’où le verbe aéronautique « se vacher » ?) . Je me remets face au vent météo, lâche l’accélérateur, me prépare à affronter gradient et turbulences, vérifie ma dérive et commence à anticiper mentalement un possible « roulé-boulé » tout en dosant mon freinage que je relâche à une dizaine de mètres du sol .
Seul le gradient est un peu fort et provoque un atterrissage vertical brutal, en quasi décrochage mais sans ces fameuses turbulences qui me rendaient si inquiet, certainement suis-je passé entre deux ?
Et là, pur bonheur, les grillons chantent, les vaches se sont approchées de la clôture de pierres sèches pour me regarder, (avec leurs yeux magnifiques les vaches d’Aubrac me font craquer), et le causse coloré d’innombrables fleurs sauvages est tout odorant d’essences de menthe et de serpolet . J’ai la gorge sèche, je suis un peu déshydraté, mais en pliant ma jolie voile rose je pense à toutes les peintures que ce « voyage » m’a inspirées …
À la différence de la première aquarelle (voir article précédent) et de ses éclaboussures spontanées, je réalise ensuite cette peinture moins « explosive », plus douce et ordonnée, où le paysage se déroule à perte de vue avec des lapiaz, prairies et champs de blés : - peut-être étais-je encore trop sous l’influence de mon vol un peu « musclé », pour la première réalisée ?
(« Vers l’horizon» aquarelle Alain MARC)
Celle-ci est plus proche de ce que je voudrais exprimer : dans les yeux de mon enthousiasme le sol est maintenant loin dessous, c’est une fête de couleurs, une écriture vivante, pleine de vent, de poésie et de gaîté … (« Regard du causse à la vallée» peinture Alain MARC)
C’est un détail de la précédente : je pense que j’en réaliserai une grande toile avec des glacis et matières à l’acrylique ou à l’huile, en atelier … (« Regard du causse à la vallée» détail peinture Alain MARC)
20 secondes de pur bonheur, extraites de ce vol d’une heure et demie dans le ciel du Causse Comtal .
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