Étude des couleurs pour un marché Africain .
Revenons à notre marché africain …
Si la qualité du dessin est très importante dans ce genre de croquis aquarellé, la nature des couleurs l’est bien davantage ! Effectivement on ne peut parler « Afrique » sans penser « couleurs », et lorsqu’on prépare son matériel avant de partir, il vaut mieux ne pas se tromper . Tout simplement parce qu’une fois sur le motif il faut être très rapide pour peindre, et que du temps perdu à chercher ses mélanges ou changer en « catastrophe » sa gamme (même si on connaît sa palette habituelle « par coeur » car la nature des teintes de base change selon la température et la nature de la lumière des lieux), c’est la garantie d’un motif raté quand ce n’est pas une page gâchée . Je fais donc avant chaque voyage une palette différente selon l’endroit où je me rends . Aussi étonnant que cela paraisse, la nature et la pureté des couleurs employées conditionne considérablement la rapidité des mélanges et par conséquent la fidélité et la fraîcheur de la peinture, la réussite des motifs … La couleur en aquarelle n’est pas seulement importante par la nuance des teintes utilisées : la transparence, la luminosité, ou au contraire l’opacité ont un rôle essentiel dans les mélanges . Ce sont ces mélanges qui donneront en fonction de la nature du sujet représenté une impression de légèreté ou de lourdeur, de brillance ou de matité, certes, mais aussi de choses auxquelles le peintre ne pense pas toujours comme les sensations de la chaleur, de la fraîcheur, et même du goût ou des odeurs ! (Carnet du Ghana Alain MARC)
Ici, le soleil est plus chaud, plus violent, plus vertical, renforçant la vivacité et les contrastes de couleurs . La « température » de la lumière elle-même est plus élevée, à cause d’un grand nombre de facteurs, dont ceux de la poussière, de la présence de l’harmattan et de bien d’autres éléments qui interfèrent dans sa nature (mais elle se « refroidit » considérablement au filtrage de la couverture végétale dans les forêts tropicales ou équatoriales …) .
Il faut donc choisir des couleurs plutôt intenses et transparentes, conserver quelques terres lumineuses dans des gammes chaudes, et surtout en prendre assez peu afin de ne pas s’encombrer et de « jouer » plutôt sur la nature des mélanges .
Voyons par exemple le choix des rouges . On penserait qu’ils sont tous plus ou moins identiques selon les marques, qu’ils ont la même luminosité, etc., erreur : il faut les essayer sur un papier identique à celui de notre carnet de voyage et attendre qu’ils soient bien secs pour faire son choix . Je conserverai pour ma part le rose permanent de W § N (qui est sur une 2ème feuille d’échantillons consacrée spécialement aux roses) parce qu’il est transparent intense, l’oxyde rouge et le vermillon de Chine de Sennelier, mais en fin de compte je ne le mettrai pas dans ma palette car j’obtiens le même rouge en mélangeant rose permanent et jaune indien !
Voici ma « palette d’Afrique » : vous voyez que si la plupart des couleurs nous sont communes qu’on parte au Groenland ou au Togo (comme les bleus), certaines teintes s’avèrent indispensables telles le jaune indien, le green gold, le gold ocre, l’oxyde rouge et le marron de pérylène, ou le mauve permanent qu’on retrouve dans grand nombre de vêtements ou de fleurs . Pour obtenir les plus beaux verts essayez donc le mélange des bleus (ainsi que du vert de Hooker) avec le green gold et le gold ocre … Faites aussi des orangés lumineux et nuancés avec l’auréoline et le rose permanent . Rajoutez d’autres exercices qui seront une véritable révélation si vous ne les avez pas déjà testés : green gold + mauve permanent, gold ocre + rose permanent, oxyde rouge + bleu outremer, etc. .
Passons à présent à notre matériel annexe : un carnet relié pas trop encombrant avec une feuille intercalaire légèrement absorbante (au cas où il faudrait rapidement « battre en retraite » en refermant précipitamment son carnet), un crayon 2 B bien affûté (cutter dans la poche) qu’il vaut mieux préférer à un porte-mines (attirant trop les convoitises) et son habituel pinceau à réservoir (à changer dès que la pointe s’émousse) .
Manière de travailler la plus efficace :
a) - faire un tour du marché en se promenant avant toute chose pour repérer les sujets les plus intéressants, le meilleur éclairage (par exemple lorsque nous avons le soleil dans le dos nos motifs l’ont dans les yeux et nous voient moins donc on est plus tranquille pour travailler), choisir les endroits les plus discrets pour s’installer (si on ne nous voit pas c’est souvent le mieux), ceux offrant la meilleure possibilité de s’échapper facilement en cas de nécessité (si, si, j’ai dû plusieurs fois « battre en retraite » précipitamment quelques rarissimes fois, donc n’oublie pas ce cas de figure quand vous vous « m’installez » quelque part, par exemple si vous voulez dessiner des animaux protégés mais tué et à la vente comme certains singes et autres animaux - le carnettiste est aussi un témoin -), etc.
b) - se faire des « alliés » si on le peut et qu’on ne puisse pas se faire « discret » pour peindre (personnes avec qui on sympathise ou à qui on achète quelques marchandises et au coin de l’étal desquelles on s’installe - en leur ayant demandé la permission - pour dessiner ce qu’on voit),
c) - changer de coin régulièrement,
d) - avoir l’œil sur tout (y compris derrière soi si on n’est pas appuyé à un mur !),
e) - dessiner et peindre vite , en « anticipant » (par exemple en commençant une silhouette quand elle encore assez loin afin d’ajouter les détails ou couleurs au fur et à mesure ou elle s’approche),
f) - laisser tomber un sujet qu’on n’a pas le temps de terminer et passer à un autre,
g) - ne rien avoir qui « traîne » à côté de soi ou au sol : tout doit être sur vous, de préférence dans des poches intérieures et ses documents d’identité et de voyage + argent dans un endroit très sur, spécialement destiné à cet usage (ceinture de type « Trekking », poche pectorale, etc.) .
Alors « à "votre" pinceau » dès le prochain voyage ?