Aquarelle Aven Noir : de la prise de notes au travail d’illustration en atelier .
Utilisation de quelques prises de notes au fond de l’Aven Noir .
Croquis de départ : ceux représentant mes coéquipiers dans différentes attitudes et positions, et croquis d’une colonne au pied de laquelle se sont formés de magnifiques gours en escalier . Objectif : réaliser une grande illustration en aquarelle plutôt « réaliste » format 105 X 75 cm . Meilleures sont les notes plus le résultat sera précis, d’où l’intérêt de bien agir sur le motif dans le sens où je l’ai indiqué lors de l‘article précédent . Je pars des prises de notes et croquis directement faits sur le motif … (Photo et croquis Alain MARC)
Pour travailler, une fois le personnage terminé, c’est assez simple, mêmes principes que sur le motif : il faut commencer par la préparation sur les palettes des couleurs dominantes (d’abord les plus claires), et en faire beaucoup . C’est ensuite seulement (au fur et à mesure où on avance son travail), que les couleurs les plus sombres vont par contraste de valeurs affirmer les formes, donner les volumes et établir la profondeur .Le passage à la couleur doit être parfaitement organisé, avec une assiette de gamme de couleurs par nuance, et toujours les notes de terrain sous les yeux . J’ai immédiatement mis en place le personnage, car c’est autour de lui que va « s’ordonner » le monde souterrain (et non le contraire, car c’est ce petit bonhomme au milieu de cette étonnante immensité qui va lui donner toute son importance et son mystère en « l’humanisant » par sa présence, - faire les roches en premier ne peut que donner l’effet d’être « écrasé » par elles -) (Photo et aquarelle Alain MARC) .
Ce qui compte le plus, c’est de maintenir l’équilibre des similitudes de couleurs sur toute la gamme des familles de roches d’identique composition . Le reste n’est qu’une question de patience … (Photo et aquarelle Alain MARC)
Dans une irréelle lumière, Roland observe des excentriques au plafond, cachés par des draperies derrière la colonne . De toute part des cristaux et des concrétions d’aragonite nous éblouissent de leur blancheur en scintillant sur les stalactites, les stalagmites, les colonnes, et les draperies : on dirait des diamants qui brillent de mille feux … (Aquarelle Alain MARC)
Détail de l’aquarelle : seule, la voûte de calcite blanche surbaissée au dessus de Roland réfléchit avec une extraordinaire vivacité la lumière des lampes . Contraste étonnant entre cette lumière quasi « céleste », l’eau qui ruisselle, et la profonde et mystérieuse pénombre derrière la colonne, et qui se reflète aussi dans l’eau des gours : comme si on assistait à la naissance d’un oasis au milieu du plus austère des mondes minéraux ! (Aquarelle Alain MARC)
J’offrirai cette aquarelle ce soir à la tombola du Téléthon d’un petit village de l’Aveyron ; j’espère que celle ou celui qui la gagnera prendra conscience des beautés extraordinaires qui se cachent sous nos pieds … « La colonne aux gours au fond de l’Aven Noir », 105 x 75 cm (Aquarelle Alain MARC) . En fait, sur mon aquarelle la partie paraissant entièrement noire sur la gauche du motif ne l’est pas, on devine des pans de parois verticales et surplombantes où se détachent d’immenses stalactites ! J ‘ai voulu dans cette illustration traduire sans lyrisme exagéré ni synthèse mais plutôt avec réalisme le mystère, l’immensité de la caverne, son silence, son étrangeté, mais aussi son étonnante beauté . Le personnage donne une échelle et apporte une dimension « humaine » à cet endroit particulier .
Ma réponse : - généralement et chaque fois que je le peux je fais mes aquarelles sur le motif, surtout si je veux traduire une atmosphère qui lui est intimement liée . Il m'arrive aussi très souvent de faire sur le motif (ou tout à côté si je ne peux plus le voir car il a disparu - animaux, scènes fugaces -) une aquarelle très synthétique ou "abstraite" qui se détache complètement de la réalité en essayant d'en conserver "l'essence", (l'âme ou l'esprit en quelque sorte), ou bien à partir de la vision qu'il m'en reste en mémoire lorsque cette réalité a été forte et surtout très prégnante (exemple mes aquarelles de vol libre) .
Dans le cas qui nous intéresse ici, où j'avais peu de temps pour faire un travail élaboré, je te réponds "les deux", puisqu'un (ou plusieurs) croquis ont été réalisés sur le motif, généralement en prise de notes rapides (car je n'avais le temps de peindre entièrement plus d'un ou deux sujets) et terminés ou recommencés ensuite grâce à ces prises de notes .
C'est à partir de ces croquis que j'ai réalisé les motifs de ces femmes travaillant pour la fabrication de l'huile d'argan : directement (mais un peu plus tard comme je l'explique) en peignant sur les croquis eux-mêmes, ou bien carrément recommencés et peints sur une autre feuille dès que j'ai 5 mn et que ma mémoire de la scène est encore vivace .
Lorsque j'ai un tout petit peu plus de temps je mets en place les couleurs les plus importantes (celles qui sont déterminantes pour la compréhension, la mise en valeur ou l'impact visuel du sujet), et je laisse le reste du croquis inachevé, comme dans l'ébauche du village de Coubisou .
Quand je n'ai pratiquement pas de temps du tout, je travaille d'après photos, mais le résultat est toujours moins spontané .
Le plus important quand on débute ce genre d'approche sur le motif est d'évaluer au premier contact avec le sujet le temps qu'il va nous falloir pour le traiter dans tous les cas de figure :
- en aquarelle "aboutie",
- en croquis aquarellé (ou aquarelle rehaussée si on est bon dans cette expression),
- en croquis et prise de notes,
- en prise de notes sommaire seule .
Il faut alors du premier coup d'oeil voir dans quel type de travail s'engager si on veut être efficace .
Il est souvent préférable de faire plusieurs croquis aquarellés ou prises de notes qu'une seule aquarelle aboutie, mais ce choix dépend de chacun, et le contexte de travail autant que la nature du motif, (son importance ou non dans une démarche globale par exemple), sont déterminants .
Dans le cas de l'aquarelle qui nous concerne ici, j'ai travaillé d'après le croquis ci-dessous, d'autant plus qu'il me fallait "recomposer" la scène, (des sacs très gênants cachaient le tri des noix, et on ne comprenait rien à ce qu'elle faisait) :
La plupart des aquarelles des prochains articles sont faites ainsi sauf une entièrement faite sur le vif .
Quand on fait cela, il faut sans arrêt penser à noter les couleurs et les ombres ne serait-ce que par des hachures .
L'habitude et l'expérience permettent de terminer "en aveugle" par la suite, en ne se trompant que très peu par rapport aux couleurs, au modelé et à la lumière .
Je préciserai plus tard comment réussir une "prise de notes" ce qui fait progresser, tout en cultivant sa mémoire ...