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Andalousies

«Andalousie, la Route d’Alain MARC», carnet de voyage de Pierre NAVA
Découvrez article après article en cliquant sur les vignettes ci-dessous le carnet spontané de Pierre m’accompagnant en Andalousie, et les «Petites Histoires vidéo» qu’il m’a inspirées :

La-Barca-1b-Pierre-Nava.jpg

Préambule

La Barca 2a Pierre Nava

L'étape de Peniscola

Andalousie b Pierre Nava

Sur la route de l'Andalousie...

Moulin-b Pierre-San Jose 2

Au Cabo de Gata

Bateau Pierre Isleta 3b

La Isleta del Moro

Huebro Pierre vignette

Huebro, la montagne enchantée

Pierre-Nava-Guadix-4-copie-1

Guadix, les maisons troglodytiques

Rio Fardès

Le rio Fardés

1 mars 2006 3 01 /03 /mars /2006 22:25

 

Andalousie, les tumultes de Grenade …

 

Voici Grenade au fond de sa cuvette, blottie au pied de la Sierra Nevada .

Combien de fois y suis-je arrivé par l’ancienne route de Murcie, qui descend vers le centre en serpentant le long de l’Albacin ?

C’est toujours ma route préférée car l’impression d’aboutir à une sorte de sanctuaire y est bien plus forte que par l’autoroute et le périphérique dit de « circonvolucion » . C’est surtout parce que cette arrivée nous plonge dans l’irréelle vision des collines de l’Alhambra, comme la connurent sans doute les troupes d’Isabelle la Catholique lorsque après deux siècles d’impatience, d’intrigues et de combats, elles virent enfin s’élever derrière les murailles au dessus de la cité les minarets de briques roses, et flotter au dessus des palais les oriflammes multicolores aux insignes du roi Nasride .

La ville de Grenade au pied de l’Alhambra ... (photo Alain MARC)

 

Éprouvante réalité ce matin : point d’oriflammes ni de blanche médina pour nous accueillir, mais des travaux sur la voie publique dans toutes la ville, en même temps qu’une nouvelle et draconienne réglementation de circulation urbaine qui nous empêche d’arriver à l’hôtel . Aussi nous passons quatre heures dans un interminable jeu de pistes où éviter les sens interdits, les embouteillages et les agents de circulation nous chassant du centre ville relève de l’exploit !

Infernale Grenade pour la circulation routière …

Exténués, nous parvenons enfin à trouver un parking non loin de notre hôtel, et entrons affamés dans la première bodega venue où d’énormes jambons accroché au plafond sont en train de narguer la faim qui nous tenaille .

Les "bodegas", les "tascas", une richesse de l'art de vivre au pays de Cervantès ! Excellence des tapas, c’est ce qui fait tout le charme des commodités espagnoles : pouvoir se restaurer à n’importe quelle heure et de ne plus se soucier d’autre chose que de la convivialité de cet instant . Et quand bien même seriez-vous un nordique endurci prenant vos repas à heure très précise, vos serez bien obligés en Espagne de prendre d’autres habitudes et de manger fort tard ou à toutes les heures, ce qui est très déroutant au début pour qui ne connaît pas .

Grand choix de tapas, excellentes et copieuses à choisir au comptoir … (photo Alain MARC)

Mais quand vous en serez à la quatrième « copita », au jambon Serrano, aux propos d’amitié sur fond de brouhaha teinté de flamenco, alors là difficile de penser au retour et aux grises journées de beaucoup de banlieues de nos villes nordiques .

La bodega où nous nous précipitons affamés par notre arrivée épuisante à Grenade : typiquement andalouse avec ses tonneaux empilés et le trophée du taureau au dessus du bar . (photo Alain MARC)

Il y a trop à dire sur Grenade . Je ne peux être bref, et encore je me limite . J’espère pouvoir le faire un jour .

En attendant, nous regardons depuis la ville basse la citadelle de l’Alhambra, comme sur un nuage . Nous n’aurons pas le temps d’y monter cette fois, mais nous y reviendrons pendant le stage du mois d’avril . Personnellement, il y a longtemps que je connais ce palais des Mille et Une Nuits, j’y consacrerai un jour tout un chapitre … Il faut dire qu’à présent après tous ces tracas dans la circulation urbaine, nous n’avons qu’un désir : paix et tranquillité loin du tourisme de masse qui gâche en grande partie tout séjour à Grenade !

Yolande me dessine en train de repenser le monde autour des tapas … (croquis Yolande GERDIL)

Nous laissons donc le rêve sirupeux des jardins merveilleux accrochés à leurs murailles et prenons la direction des vieux quartiers dans la ville basse où d’ ostensibles stigmates vestiges d’un passé multiple et bouleversant réapparaissent souvent sous les plâtras d’une façade, dans la pénombre d’un passage, ou mieux encore dans une mélopée entendue au hasard à l’angle d’une rue, ou dans le regard noir, vague et mystérieux d’un passant disparaissant sous quelque porte cochère .

La cathédrale de Grenade . (aquarelle Alain MARC)

Ici le minaret d’une ancienne mosquée, là une porte moresque ou juive, ailleurs l’appel étrange et lancinant d’un vendeur de billets de loterie ou d’une marchande des quatre saisons, parfois les suppliques d’un mendiant …

« Alcaicéria », « Corral del carbon », quartiers sombres et bruyants, entrelacs des ruelles derrière la cathédrale, places de Ribrambla ou de la Trinitad, autant de lieux qui disent et redisent toute la suffisance des colons conquérants et des secrets honteux qui empreignent encore d’une immense tristesse les vielles pierres noircies de promesses trahies aux arcanes des siècles .

Place Santa Ana et église du même nom à l’ancien minaret mudéjar transformé en clocher . Au dessus, sur la colline une tour de la « alcazaba » tête de proue du palais de l’Alhambra . (photo Alain MARC)

Yolande et Pierre dessinent de leur côté, on se retrouvera Plaza Santa Ana et moi je pars tout seul en quête de cette âme doucereuse, amère et tragique dans la mémoire de Grenade …

La place Santa Ana par Pierre Nava, superbe représentation !

Ce n’est plus le regard seulement qui écoute : de toute la clameur des rumeurs de la ville se répète un écho qui traverse le corps …

Il est là comme un souffle, cet immuable et obscur tumulte que Lorca dénonçait et dont il fut la victime comme tant d’autre avant lui, juifs, noir, morisques, socialos, communistes, intellos libéraux et autres syndicalistes :

« Y hoy que el hombre profana tu sépulcral encanto,

quiero que entre tus ruinas se adormezca mi canto

como un pajaro herido por astral cazador . »

« Et aujourd’hui que l’homme profane ton sépulcral enchantement,

je veux qu’au sein de tes ruines s’endorme ma chanson

comme un oiseau blessé par un astral chasseur . »

« Granada », Frédérico Garcia Lorca .

Place Paseigas, depuis l’étal de la marchande

des quatre saisons . (photo Alain MARC)

Rue de Elvira, San Augustin, Almireceros ...

Je viens de saisir quelques bribes sonores de cette mémoire de Grenade, infiniment précieuses parce que si peu perceptibles de tant de visiteurs indifférents à de telles consonances, et qui n’ont d’yeux et d’oreilles que pour l’éblouissant Alhambra !

J’essaierai dès demain de les mettre en ligne et de vous les offrir avant que de partir avec Yolande et Pierre pour un lieu différent où bat aussi très fort le cœur de Grenade : le vieux quartier arabe de l’Albacin, l’ancienne médina, si chère à Manuel de Falla, une autre approche de l’âme grenadine où j’essaierai aussi de réaliser quelques enregistrements qui puissent en révéler, si possible, la «secrète  musique » .

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27 février 2006 1 27 /02 /février /2006 23:34

 

Andalousie, les troglodytes de Guadix .

 

Réveil matinal plutôt glacial avec le vent du nord qui balaye la ville blottie au milieu de dunes érodées d'argile, de calcaire et de grès rose .

Parcours du combattant pour trouver un bar qui ne soit pas complètement enfumé par le tabac des consommateurs afin de prendre notre petit déjeuner .

Étonnante cité entourant sa cathédrale, où les rues du centre sont animées et vivantes, toutes bordées d'anciens palais dorés au façades ressemblant à des bâtisses vénitiennes aux teintes ocres, rouge grenat, parfois toutes blanches .

On ressent tout un mélange de civilisations et d'influences à Guadix : d'extravagance et de sérénité mêlée . (photo Alain MARC)

Yolande note ces façades de décors de théâtre, ces porches en anses de panier suspendus au dessus de frêles colonnades . (aquarelle Yolande GERDIL)

 

« L'alcabaza », le vieux château ( IX ° siècle) au dessus des quartiers hauts sur fond de Sierra Nevada . (photo Alain MARC)

Les collines colorées qui entourent Guadix, falaises ruiniformes aux cônes d'argile empilés les uns sur les autres, ressemblent à la surface d'un gigantesque sac de pommes de terre tant leur aspect chaotique leur donne l'allure d'un paysage en perpétuelle transformation .

Le plus étrange, ce sont ces façades blanchies à la chaux et percées de portes et fenêtres taillées à même la roche terreuse, qui se détachent comme autant de singulières entrées troglodytiques d'habitats des plus charmants qui soient ! (photo Alain MARC)

 

Il en est ainsi d'un quartier entier de Guadix, le quartier gitan, véritable taupinière, où le plus étrange est constitué par les cheminées dépassant du sol sur le flanc des collines, parfois loin de toute entrée visible, qui prouvent à quel point les pièces auxquelles elles correspondent s'enfoncent profondément dans le sous-sol . (photo Alain MARC)

Nous cheminons de talus en maison par-dessus les habitations de terre, sans savoir où nous sommes exactement tant cet étrange univers est fascinant . Pierre et Yolande ne savent plus où donner des yeux et du stylo ! (croquis Yolande GERDIL)

Les rues serpentent au milieu de ce drôle de fouillis, et on y ressent la présence d'une part énorme de l'âme andalouse qui hante ces buttes de terre ocre, rappelant au visiteur toutes ces générations de bêtes à figures humaines qui étaient traquées dès la chute du royaume de Grenade, comme la racaille maurisque à laquelle elle furent un temps assimilée . Elles fuyaient les villes d'où elles étaient exclues, se réfugiant où elles pouvaient pour survivre, et dont le luxe était quelques siècles plus tard ces terriers transformés en palais faméliques (Aranda ministre au XVIII° siècle de Charles III fait ériger un édit permettant aux gitans de résider où bon leur semble pourvu qu'ils ne portent pas atteinte aux bonnes moeurs et respectent la propriété privée) . (photo Alain MARC)

Encore un croquis de Yolande perdue dans le dédale des ruelles, à la recherche de cette mémoire du ventre de la terre . (croquis Yolande GERDIL)

L'entrée d'une maison où sèchent des piments en chapelets vermillon . Comme un oeil surgissant de la terre, un frisson venant du fond des âges, cette façade nous renvoie à l'éternelle mémoire gitane du peuple andalou : un mélange de cultures et de traditions nourries de cryptes mozarabes, de lointains chants indous, de fleuves migratoires aux mélodies hongroises, roumaines ou bulgares, de regards égyptiens et flambeaux de synagogues . Il s'en dégage cette magie muette et pourtant très criante d?une lumière étrange qui nous prend à la gorge dans le frisson du flamenco . (photo Alain MARC)

J'avais été accueilli en 1994, chez un gitan des « grottes » de Guadix . Nous devisions au fond de sa cave dernière pièce de sa maison éclairée d'un lanterneau donnant sur l'autre côté de la colline : nous avions traversé la falaise, et l'intérieur des pièces toutes blanchies de chaux donnaient à cet intérieur étrange un aspect de vielle maison villageoise andalouse qui n'aurait pas eue de fenêtres . Il y faisait très bon, toujours la même température aussi bien l'été que l'hiver me disait le gitan, et ses nombreuses pièces presque toutes en enfilade étaient éclairées à l'électricité, il recevait même la télévision dans sa salle à manger grâce à une antenne plantée à même le sol tout en haut du talus .

 

Croquis aquarellé d'anciennes fenêtres d?argile s'ouvrant dans les falaises du quartier gitan de Guadix . (aquarelle Alain MARC)

Croquis aquarellé de Yolande GERDIL, réalisée à la sortie nord de Guadix, qui prouve combien la tradition de ce type de construction est toujours vivace et appréciée .  

Maintenant, nous partons pour Grenade ! 

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27 février 2006 1 27 /02 /février /2006 01:17

 

Andalousie, d’Almeria à la Sierra Nevada .

 

Nous quittons le sud-est des faubourgs d’Almeria en contournant la ville par l’est, direction Grenade .

Almeria nécessiterait une visite approfondie, surtout son vieux quartier de pêcheurs dénommé « El Chanco » et son château arabe (l’Alcabaza) dominant toute la ville . Les vieilles murailles s’élèvent toujours fièrement autour de l’antique médina dont il ne reste plus grand-chose . Ce sera pour une autre fois …

Peu de temps après avoir dépassé les banlieues nord de la ville, le paysage devient plus aride et grandiose encore : c’est que nous entrons au pied de la Sierra de Alhamilla dans le désert de Tabernas, traversé par la « rambla » du même nom .

Décor somptueux des « westerns-spaghettis », la Sierra de Alhamilla se dresse au dessus des célèbres ruines en plâtre et carton-pâte de films aussi célèbres que « Il était une fois dans l’Ouest », « El Condor » ou « Les sept mercenaires » . Ce paysage que nous traversons trop vite est très attirant : le désert de Tabernas est un miracle de la vie qui cache ses trésors au fond de ses ramblas arides, un univers de poussière allant d’ondulations en canyons pulvérulents et torturés aux couleurs ocres, dorées et cuivrées à la végétation steppique qui n’a pas changée depuis des millénaires . (photo Alain MARC)

 

J’ai voulu avec cette encre aquarellée traduire les nuances tranchées des teintes du désert de Tabernas, dernier désert d’Europe, étonnant de sauvagerie . Les herbes sèches qui y courent en hordes de boules fauves nous emmènent dans des rêves enfantins où on croit deviner des Sioux ou des Comanches se cachant derrière les rochers … (aquarelle Alain MARC)

Parfois une sorte d’oasis, avec des oliviers et des orangers, quelques bouquets de palmiers, et un troupeau de chèvre broutant les rares herbes jaunies . (photo Alain MARC)

C’est qu’il y a non loin d’ici un ancien cortijo aux murs blanchis à la chaux ressemblant à de vielles maisons de la campagne mexicaine . (aquarelle Alain MARC)

 J’y avais peint il y a quelques années déjà cette aquarelle du verger protégé de sa haie de figuiers de Barbarie et de bouquets d’agaves bleutés qui faisaient vibrer les couleurs du sol ocres rouge et vieil or tandis que la montagne derrière disparaissait dans une pulvérulence violine et lie de vin .

(aquarelle Alain MARC)

Nous laissons derrière nous cette terre étonnante, dernier désert d’Europe , espace mystérieux disparaissant de notre regard pour voir en face se profiler la Sierra de Los Filabres que nous longeons au sud ouest avant de voir sur notre gauche les premières pentes de la Sierra Névada s’enfonçant dans les nuages  .

Rayon de soleil sur le Cerro Grande, dernière avancée de la Sierra De los Filabres et de Baza vers l’ouest . (photo Alain MARC)

Sierra Névada : encore une montagne mythique ! Elle culmine à 3482m au dessus de Grenade, et ses sommets enneigés disparaissent aujourd’hui dans la tourmente car le temps s’est beaucoup dégradé . Nous sommes passés sans nous en rendre compte des chaleurs arides aux froidures enneigées . La Sierra est sauvage et désolée . Nul village ne vient ponctuer son immensité . Pourtant sa secrète beauté tient à sa nature protégée où la chèvre ibérique (sorte de bouquetin local) est l’une des fiertés de ses parcs naturels . La Sierra Névada que j’aime le plus est celle de son piémont du sud, celle des Alpujarras, endroit particulièrement attachant dont les villages accrochés à ses pentes ressemblent à s’y méprendre à ceux de l’Atlas . Il faut dire qu’ici les maures chassés de Grenade trouvèrent de quoi vivre et se réfugier longtemps encore après la reconquête .

Des rouleaux de nuages noirs témoignent de la tempête qui souffle sur les sommets vers la pointe du Chullo 2600m plus haut … (photo Alain MARC)

Parfois une éclaircie permet aux sommets d'apparaître : magnifique vision nous laissant présager qu’à Grenade il va faire ce soir certainement plus que frais ! (aquarelle Alain MARC)

Une halte à La Calahorra, car le ciel se déchire et le paysage se transforme en décor fantastique où le jour le dispute à la nuit à grands coups de gloires et de trouées de lumière surgissant des nuées .

Le château de la Calahorra découpe sa silhouette massive au dessus du village et de la vallée comme un récif défiant les éléments . (photo Alain MARC)

J’aime ces ambiance de fin des temps qui nous propulsent dans le rêve et l’irréalité . Dire que la silhouette massive de ce château sans apparent attrait cache comme un écrin un adorable patio renaissance ! C’est que l’ensemble avait été réalisé par des artisans artistes italiens pour le fils naturel d’un cardinal en ces temps reculés … (aquarelle Alain MARC)

Mais la nuit tombe très vite : il est trop tard pour rallier Grenade, nous faisons étape à Guadix où nous resterons demain pour la journée, car cette petite ville offre de nombreuses particularités, et dans la pénombre sa cathédrale éclairée est déjà une invitation à rester : nous allons d’ailleurs avoir bien des surprises dans une aussi étonnante contrée !

  (photo Alain MARC) 

 

 

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24 février 2006 5 24 /02 /février /2006 19:23

  

Enfin l’Andalousie, sur les traces d’un mythe …

 

…Un mal fou à trouver des cybercafés ici, ce qui explique le silence des jours qui s’enchaînent et que nous ne voyons plus passer sous ce chaud soleil du sud, tout au bord de cette mer dont le bleu est si intense qu’il étourdit presque !

J’ai pris l’ordinateur portable avec toutes mes bases de données, les archives des anciens repérages mais ce n’est pas simple de travailler !

C’est que nous sommes au paradis et on ne voudrait pas en partir .

Ou plutôt on ne sait plus très bien où nous sommes, de quel côté de la Méditerranée nous sommes entrés dans cette notion du temps à la renverse qui nous propulse dans un rêve éveillé .

Déjà des panneaux sur la route quelques kilomètres avant d’arriver, nous laissent douter des limites de l’histoire toujours recommencée, nous rappelant d’une étrange façon que c’est ici que le royaume d’Al Andalous a débuté lorsqu’un certain Tariq venu de Bagdad, accompagné de plus de berbères que de princes guerriers du Moyen-Orient débarquait en l’an de grâce 711, sans savoir qu’il allait changer pour des siècles l’histoire et le visage de tout un pays ! (photo Alain MARC)

D’abord, il y a ces plateaux de torpeur écrasés par le soleil où l’ocre de la terre crevassée de sècheresse s’érige de monticules en dômes chérifiens, secrets écrins de son plus vital breuvage de survie .

Ce sont les indispensables et rares « pozos » millénaires, les puits protégeant l’eau, où chaque goutte est précieuse, stockée aussi dans ces « aljibes  abovedados » les antiques citernes à la toiture voûtée .

Et puis le paysage, les couleurs et la nature, l’aspect des bourgs et des maisons qui nous transportent ailleurs, dans les djebels présahariens qui ont tout de commun jusqu’à leur éclatante lumière avec cette émergence africaine déposée ici comme par miracle sur les rivages si longtemps convoités par Isabelle la Catholique . (photo Alain MARC)

Un « cortijo » isolé adossé à la sierra, aux toitures en terrasses comme les maisons du maghreb, aquarelle réalisée par Yolande pendant que je faisais quelques photos . (aquarelle Yolande Gerdil)

Ruines d’une antique noria au pied de la Sierra du Romeral à quelques centaines de mètres de la plage : une ambiance très « présaharienne » qui n’a rien à envier aux djebels dénudés que traverse bien plus loin le serpent bleu et argenté du superbe fleuve Draa …  (photo Alain MARC)

C’est d’ailleurs depuis le sud que nous aurions dû arriver en Andalousie : si j’aime tant le Maroc, les pentes de l’Atlas, l’incontournable Marrakech sur la route de Tanger, c’est pour mieux retrouver par delà le Détroit les terres andalouses où bruissent toujours dans le chant de ses sources les mirages perdus d’un éden onirique qui exista pourtant réellement pendant quelques siècles mythiques …

Cet itinéraire bien plus que celui qui nous amène du nord, est le plus enrichissant pour qui veut entrer en communion avec l’identité andalouse, pour comprendre quelques-unes de ses plus profondes subtilités, et saisir aussi ses différences .

Ce n’est pas le printemps sur une terrasse de l’Atlas où les palmiers dattiers ombragent les vergers, ni un oasis aux parterres de senteurs en vallée d’Ounila, mais un « huertito de vergel » (jardin de verger) au pied du « Serro  des Améthystes » à quelques dizaines de kilomètres d’Alméria . (photo Alain MARC)

Ne cherchez pas sur la carte : ce coin-là personne ne le connaît à part les autochtones, mais un jour je le sais je prendrai cette route d’arrivée par le sud pour imaginer ici que l’Atlas continue et en hommage à Lévi-Provençal le génial géographe qui a su révéler l’existence de ce fil conducteur d’une même beauté des deux côtés de la Méditerranée .

Voici, émergeant d’un vent de sable qui balayait la vallée, un fortin nasride tel que nous le découvrîmes lors de mes premières incursions dans cet endroit d’Andalousie en septembre 1992 . Il défendait dans les années 1480 la route menant à un petit port tout proche aujourd’hui disparu, alors que le royaume Nasride était acculé aux avancées de la reconquête et en butte à d’autres conflits nord-africains . (photo Alain MARC)

Le paysage désertique, l’étonnante végétation subtropicale, les sierras dénudées, tout nous plongea immédiatement dans une atmosphère d’un exotisme rare que je fis partager aux stagiaires du premier carnet de voyage dans cette région quatre années plus tard .

Mes voyages répétés pendant des années à sillonner bien des pistes de cette étonnante région (l’Espagne faisant partie de ma vie depuis mon enfance - lorsque avec mes parents nous allions visiter les familles des réfugiés qu’ils avaient accueillis de ce côté-ci des Pyrénées -), m’ont permis d’en suivre l’évolution, de me réjouir des bienfaits apportés à ses habitants par les avancées technologiques et d’équipement, mais de me désoler de voir certains lieux qui auraient du être protégés aménagés à outrance pour le tourisme et l’urbanisation, créant des outrages irréversibles dans des zones à l’équilibre naturel, écologique et archéologique déjà très fragile . (photo Alain MARC)

À présent le fortin nasride photographié hier au milieu de pelouses d’herbe tendre (ce qui est très rare ici où le climat - dixit les météorologues de l‘université de Grenade - est comparable à celui de Bagdad avec plus de 3000 heure d‘ensoleillement pour 156 mm seulement d’eau par an) constellées de fleurs (il a exceptionnellement plu cet hiver nous disent les autochtones), avec sa route à présent totalement bétonnée (oui, c’est du ciment qui a remplacé la jolie petite piste sablonneuse de la photo précédente), et tout au fond la mer …  (photo Alain MARC)

Pierre ne peut résister à la tentation de dessiner plusieurs fois ce paysage, et pendant qu’il s’installe face au fortin, Yolande en fait de même avec un autre point de vue, tandis que je vais explorer les entrailles de la vielle bâtisse enfin dégagée de ses broussailles et des tonnes de fumier qui envahissaient les pièces du rez-de-chaussée lorsque ces dernières années c’était encore l’abri improvisé par les bergers de la contrée pour leurs chèvres et brebis .  (photo Alain MARC)

Le fortin de Pierre, (aquarelle Pierre NAVA)   ... et celui de Yolande, non loin d’un hameau avec ses maisons en terrasses traversé en repartant . (aquarelle Yolande GERDIL)

Étonnant endroit où se mêlent tous les visages méditerranéens : on passe presque sans s’en apercevoir de lieux évoquant le Maroc ou la Tunisie à d’autres ressemblant à la Sicile ou à la Grèce sur le fond bleu de la mer ! (photo Alain MARC)

 Dessin de Yolande avec en bas à droite le personnage symbole de la province d’Almeria inspiré d’une gravure rupestre tenant dans ses bras un arc semblable à un soleil levant . (croquis Yolande GERDIL)

Miracle de la vie, cette herbe verte qui tapisse la rocaille entre agaves et cactus, disparaîtra bientôt aux premières chaleurs du mois de mars ou d’avril pour ne plus laisser place qu’à sa mémoire africaine cuivrée des roches volcaniques du désert … (photo Alain MARC)

 Pour le moment c’est ici le printemps, et quand bien même on n’aurait pas l’âme botaniste on passerait des heures à courir de talus en « barrancos », à s’émerveiller des espèces les plus rares ! (Miguel Mansanet, dans son livre sur la Comarca en a recensé sur seulement quelques kilomètres carrés 72 espèces extrêmement protégées) (photo Alain MARC)

  L’astéricus maritimus est l’une d’entre elles, et ses bouquets à capitules semblables à des soucis entièrement jaunes, éclatent dans la rocaille comme autant d’explosions ensoleillées … (photo Alain MARC)

 « Le Grand Bleu » : - vous vous souvenez du film ? Eh bien nous l’avons retrouvé ici avec des rochers blancs, mauves, ocres, orangés, saumonés, gorge de pigeons, qui plongent dans une mer turquoise et cobalt . (photo Alain MARC)

Dans la solitude et la pureté, avec pour tout bruit de fond celui de la brise marine, du cri des oiseaux de mer et du clapotis des vagues mourant sur les rochers … (photo Alain MARC)

Il y a longtemps déjà j’avais dessiné les calanques du Cerro Negro, des astéricus, et peut-être …notre déjeuner ! (photo Alain MARC)

De la beauté à l’état pur vous dis-je : une immense toile contemporaine en trois dimensions, que j’oserai parodier sur un bout de papier parce que c’est plus fort que moi, irrespectueux que je suis des choses trop belles pour ne pas tenter de les dessiner … (photo Alain MARC)

C’était comme si je n’avais pas les bonnes teintes dans la palette, comme si je ne connaissais plus rien aux mélanges et aux rapports de couleurs, comme si je ne savais plus rien faire que regarder et pleurer ! (aquarelle Alain MARC)

Dans le film du « Grand Bleu » : - vous souvenez vous aussi de l’adorable petit port où tout au début du film les enfants plongeaient ?

Celui-ci y ressemble beaucoup avec ses maisons les pieds dans l’eau, ses barques de pêcheurs colorées, et une vie encore paisible rythmée par la mer et les saisons … (photo Alain MARC)

Comme sur une île grecque, mais c’est en Andalousie !

(aquarelle Alain MARC)

Les photos à elles seules deviennent des tableaux parce que les choses sont simples, pures, équilibrées, et que l’harmonie qui se dégage de ce rapport au monde passant par la nature n’est rien d’autre que le souffle de la vie . (photo Alain MARC)

L’une des grèves du village qui s’étire paresseusement au pied des maisons .(photo Alain MARC)

Un autre coin du même endroit, un peu taché par les embruns …

(aquarelle Alain MARC)

Yolande et Pierre s’en donnent à cœur joie, (photo Alain MARC)

…et les poissons tout frais ramenés ce matin par les pêcheurs en barque nous sont servis à la petite auberge qui a les pieds dans l’eau, mais on ne cesse de peindre même à table comme si gagner le paradis était à ce prix ! (photo Alain MARC)

On oublie vite autour du « vino tinto » et de « l’abrasado pescado  » qu’ailleurs il ne fait pas forcément très beau, que ça fait des jours qu’on n’a pas trouvé de cybercafé pour mettre mon article en ligne, et qu’il est temps de partir pour Grenade parce que l’Andalousie aux milles visages est une amante qui n’attend pas …  (photo Alain MARC)

« La mujer canta a la puerta :      « La femme chante à sa porte :

   Vida de los marinerons                  Existence des marins :

   el hombre siempre en el mar          l’homme toujours en mer

   y el corazon en el viento . »           et le cœur au vent . »

                                    Juan Ramon JIMÉNEZ

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20 février 2006 1 20 /02 /février /2006 10:58

Sur la route de l’Andalousie, du Levant aux rivages d’Alméria …

De Péniscola presque jusqu’à Alicante, la côte méditerranéenne n’est en cette saison qu’un immense jardin fleuri s’épanouissant dans une grande douceur !

Ne seraient ces infâmes usines, raffineries, centrales, zones industrielles, et le passage de l’abominable concentration immobilière de Bénidorm, la descente vers les plaines de Mourcia serait un enchantement .

 

 

Autoroutes plus que chargées, les kilomètres défilent ...

La traversée de toutes ces régions nous permet de constater à quel point l’essor touristiquo-économique est en train de ravager les dernières parcelles encore authentiques du littoral espagnol, combien son développement industriel, démographique et commercial bien légitime, nécessaire mais anarchique, bouleverse le paysage périurbain qui a perdu son âme autour de la quasi-totalité des grandes agglomérations .

Sur la route, falaises surplombant la mer, châteaux mauresques et amandiers en fleurs .

       Aussi, pour retrouver la beauté originelle du pays de Cervantès il faut s’enfoncer dans l’arrière pays en quête de lieux sublimes qui existent encore tels des trésors cachés . Il faut affronter le barrage des laideurs bétonnées, fumantes et polluantes, ou les patchworks blanchâtres et brillants des immenses serres agricoles, les filets et bâches plastiques emprisonnant des pans entiers de « campos » en cultures forcées . Alors seulement la récompense est là et on retrouve cette Espagne de mon enfance (la dictature en moins et la richesse en plus) qui ne se livre qu’aux véritables voyageurs, ceux qui l’ont méritée !

Orangers dans la région de Valence croulant sous les agrumes, les fruits jonchent le sol et sont succulents !

 Il en est ainsi comme en Catalogne de tout l’arrière pays Levantin : les Sierras sauvages sont les remparts et l’écrin de véritables petits paradis parfumés par ses arbres fruitiers merveilleusement fleuris en cette saison .

Notre regard se délecte sur leurs pentes de ces terrasses verdoyantes qui bénéficie en beaucoup d’endroits de l’irrigation inspirée des antiques systèmes de la « huerta de Valencia » (le jardin valencian), héritage des traditionnels moyens de répartition d’eau des pays arabes et méditerranéens . Ils sont simplement aujourd’hui très modernisés et généralement automatisés .

C’est sur l’une de ces terrasses aux effluves printanières que nous ouvrons à nouveau nos boîtes d’aquarelles et carnets de croquis . Les couleurs y sont aussi chatoyantes qu’à la surface de nos palettes dans la lumière qui inonde les jardins et les vergers . (photo Pierre NAVA)

 

La terre rouge, les arbres fruitiers fleuris, les citronniers, mandariniers et orangers : des parfums d’abondance, de printemps et de beauté à ne plus en finir . (aquarelle Alain MARC)

 

Une page très évocatrice du carnet de Yolande …(carnet de voyage Yolande GERDIL)

Nous traversons rapidement la région d’Alicante et dépassons l’incomparable palmeraie d’Elche (la plus grande d’Europe, magnifique héritage phénicien saccagé lui aussi par les promoteurs en tout genre) pour foncer vers la fournaise poussiéreuse du pays de Murcia, bientôt franchie grâce à l’aménagement (à présent terminé) de l’itinéraire d’autoroute reliant les grandes voies littorales des deux côtés méridionaux de la péninsule .

 

Ravinement d’une « rembla » dans la province d’Alméria .

 

 Les portes de la province d’Alméria, immense territoire de roches dénudées et de « remblas » désertiques sont en train elles aussi de se transformer en réservoirs à agrumes et maraîchages de toutes catégories et les légumes y poussent en abondance sous des océans de plastique blanc . De triste lambeaux de ces oriflammes sans gloire s’accrochent parfois arrachés par le vent aux nobles branchages d’oliviers séculaires miraculeusement épargnés au milieu des serres immenses …

Yolande peignant face au large extrême pointe orientale de l’Andalousie .

Ces visions surréalistes sont le prix à payer pour atteindre la pointe la plus orientale de l’Andalousie, premier grand rendez-vous pour qui veut comprendre et remonter le cours de l’histoire jusqu’à l’empreinte mauresque, point de départ de notre fascinante route du califat . 

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16 février 2006 4 16 /02 /février /2006 20:28

Sur la route de l’Andalousie, parfum de Méditerranée …

 

En route vers la Méditerranée, l’Espagne, la Catalogne …

 

 

Yolande et Pierre m’accompagnent, nous partons effectuer les derniers préparatifs du stage « carnet de voyage » que j’animerai en Andalousie au mois d’avril .

Loin derrière nous le viaduc de Millau, grand symbole de l’arrivée sur le Larzac avant de plonger vers les vignes du Languedoc .

 

 Ensuite le Perthus, et un dernier regard vers le Canigou et les Pyrénées embrumées .

 

 

Le Perthus c’est la frontière, toujours émouvante parce qu’elle ouvre la porte d’une autre culture . Il faut dire qu’à partir d’ici tout est différent : la végétation, le climat, la langue qui n’est plus la même avec ce catalan ensoleillé parlé couramment depuis Perpignan  .

Passage rapide le long de la Costa-Bava hideuse, défigurée par les concentrations balnéaires du tourisme de masse ; on sont-ils les adorables villages médiévaux de l’arrière pays nommés Pals, Ullastret ou Peratallada ?

C‘est d’eux dont il faut vous souvenir si vous passez en Costa-Brava, et d’autres petits coins miraculeusement sauvegardés et connus des seuls initiés de la région de Barcelone .

Ce passage en Espagne par la route de la Catalogne et du Levant est essentiel pour qui se dirige vers l’Andalousie . L’avion est pratique certes, mais il vous prive de la dimension onirique du voyage, de l’imprégnation du pays, de sa découverte véritable à travers une approche qui se déroule comme une initiation . 

Il en est ainsi en Catalogne : en s’arrêtant sur l’aire d’autoroute de Tarragone on découvre un bel aqueduc romain qui n’a rien à envier au Pont du Gard, sinon par sa plus modeste dimension .

Ce superbe monument de calcaire blond prouve avec bien d’autres dans cette région combien elle fut colonisée, traversée par toutes les grandes civilisations méditerranéennes, ce qui favorisa les échanges d’une rive à l’autre et participa activement au développement du caractère catalan marqué par le sens du voyage associé au commerce et la finance .

 

 

 L’aqueduc romain de Tarragone par Yolande (aquarelle Yolande Gerdil)

Cela permet aussi de comprendre l’une des grandes différences entre les provinces espagnoles frontières des deux bouts des Pyrénées le Catalogne et Le Pays Basque : la première tire son identité de l’histoire la seconde de son ethnique homogénéité .

La nuit est déjà tombée quand nous arrivons à Peniscola . Ce vieux village accroché à une petite presqu’île domine la mer, c`est l’étape idéale sur la route de l’Andalousie .

 

 

 

Même si les avenue menant au village et longeant la plage sont victimes d’une urbanisation balnéaire à outrance sans le moindre caractère, la vielle citadelle sur son rocher avançant vers la Méditerranée a toujours fière allure …

Premier contact avec le caractère Ibérique : nous nous régalons d’excellentes tapas à « La Barca », petit bar très sympa de la rue Jose Antonio où nous tombons en plein pendant le match de foot retransmis à la télé « Madrid - Saragosse » décisif pour la finale de la coupe royale, un moment unique auquel je consacrerai bientôt une page spéciale tant ce premier contact avec l’âme espagnole fut haut en couleurs .

 

Il ne reste plus rien dans nos assiettes tant elles étaient bonnes, mais Yolande est déjà en train de dessiner et de peindre car le ton monte dans la salle à l’entrée des joueurs sur le terrain, et tous ces regards rivés sur la télé sont expressifs …

 

Le croquis de Yolande: match + tapas + « vino tinto » pour tous, et  l’ambiance en plus : à découvrir au retour une petite merveille d’extrait dans un prochain article des rubriques « Voyages sonores » ou « Voyages vidéo » !

 

Dernier coup d’œil à Peniscola dans la brune du matin avant de repartir plus au sud, aquarelle de Yolande Gerdil .

POUR DÉCOUVRIR LES AUTRES ARTICLES DE CETTE RUBRIQUE SI ELLE A ÉTÉ OUVERTE À PARTIR DE LA CATÉGORIE "VOYAGES ET AQUARELLE" CLIQUEZ SUR LES CHIFFRES EN BAS D'ÉCRAN (1-2-3-4-5, etc) . VOUS POURREZ AUSSI ÉCOUTER LES ENREGISTREMENTS SONORES DE CE VOYAGE EN ALLANT DANS LA RUBRIQUE "VOYAGES SONORES" OU VOIR DES VIDEOS DANS "EXTRAITS VIDEOS" (COLONNE DE GAUCHE "CATÉGORIES") !

 

 

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13 février 2006 1 13 /02 /février /2006 00:40

Peindre un igloo …  

 

Pour peindre un igloo, il faut un igloo !

Pas pour le regarder et le reproduire, mais pour le réaliser de ses mains dans la neige, sa tête, et son cœur …

Après seulement on peut le peindre les yeux fermés, on s’y voit dans une nuit étoilée tout près d’un feu de camp pour se réchauffer, nous n’avons plus besoin de modèle parce que c’est l’esprit du modèle lui-même qui nous habite .

C’est l’expérience que j’ai réalisée aujourd’hui avec Petit Jo .

La forêt des Palanges enneigée est superbe en cette mi-février on peut se rêver trappeur, petit frère des esquimaux …

Tout commence par un cercle tracé sur le sol . Le cercle est une figure magique où tout peut commencer . 

Je songe à Gaston Bachelard dans sa « Poétique de l’espace », à propos de la phénoménologie du rond . Il cite Van Gogh qui écrivit : « La vie est probablement ronde », et Joë Bousquet : « On lui a dit que la vie est belle . Non ! La vie est ronde . »

Petit à petit Jo entre dans le cercle qui devient spatiale rondeur, qui devient sphérique, avec une ouverture pour investir le monde et pour revenir se réfugier …

Bientôt l’igloo est terminé, chargé de symboles et de poétiques images immaculées . Il est calice à la renverse, et comme le disait si bien Jean Laroche dans l’un de ses vers « Tout calice est demeure » .

Il faut investir les lieux nés de nos rêves, pour que d’autres rêves nous portent vers de plus belles réalités . Il en est ainsi de la création artistique qui devrait toujours naître à travers nous par d’autres voies que celles de notre simple imagination, puisant ses racines jusque dans les profondeurs obscures de notre propre identité .

Acte chamanique où se lie le globe de la terre à la rondeur de l’espace, à travers cette bulle toute de blancheur .

« Je l’invente, mes mains dessinent un nuage,

Un bateau de grand ciel au dessus des forêts … »

(Pierre Seghers « Le domaine public ») .

Il est temps d’écrire sur une feuille morte dans l’éphémère fragilité de l’instant le poème de la vie dans toute son éternité . Si la pensée avait une maison l’igloo en serait la conscience, on pourrait y refaire le monde, et tout y commencer .

Référence encore à Gaston Bachelard : « … voilà qu’on se tient dans la rondeur de l’être, qu’on vit dans la rondeur de la vie comme la noix qui s’arrondit dans sa coquille . Le philosophe, le peintre, le poète et le fabuliste nous ont donné un document de phénoménologie pure . À nous maintenant de nous en servir pour apprendre le rassemblement de l'être en son centre … Encore une fois, les images de la rondeur pleine nous aident à nous rassembler sur nous-mêmes, à nous donner à nous-mêmes une première constitution, à affirmer notre être intimement, par le dedans . Car vécu du dedans, sans extériorité, l’être ne saurait être que rond . »

Petit Jo prépare ses couleurs . Nous sommes loin de l’igloo, c’est maintenant l’igloo qui l’habite . Préparer ses couleurs appartient au processus pictural dans la logique de la construction des mondes que nous devons inventer .

Retrouver la rondeur d’un lieu mémorisé et transcendé pour passer à une autre réalité : celle d’un lieu éternisé …

L’igloo est là dans la nuit étoilée . La lune, autre sphère coupée ici dans sa moitié par Petit Jo, (comme un reflet inversé de l’igloo), illumine la clairière enneigée . Un feu de bois brûle tout à côté et Petit Jo regarde la coupole céleste où il a peint les étoiles comme si elles décrivaient déjà un arc de cercle dans leur déplacement concentrique autour de l’Étoile Polaire, mais cela Petit Jo ne le sait pas . Une porte arrondie appuyée contre l’entrée laisse supposer qu’on peut s’enfermer à l’intérieur de l’igloo pour s’abriter des incertitudes de la nuit …

« Demander à l’enfant de dessiner la maison, c’est lui demander de révéler le rêve le plus profond où il veut abriter son bonheur … »

(« De Van Gog et Seurat aux dessins d’enfants », guide catalogue d’une exposition au Musée Pédagogique réalisée en 1949, article de Madame BALIF) .

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12 février 2006 7 12 /02 /février /2006 00:29

Abstraction : un début de vérité …

 

Vous l’avez peut-être remarqué, l’abstraction existe partout dans la nature !

Seulement on ne nous apprend guère à la voir, la percevoir, la ressentir .

Il en est du monde « extérieur » comme du monde « intérieur » : la sensibilité et le regard s’éduquent se cultivent .

Même chose dans le monde de l’art, et pour peu que l’on conserve un minimum de bon sens ou de logique en observateurs bien avertis, cette « éducation » est même la plus efficace des protections contre ces vessies qu’on voudrait parfois nous faire prendre pour des lanternes …

Nous en reparlerons un jour, tant l’arrogance de ceux qui se sont spécialisés dans le « rapt » de la culture (pensant détenir l’entière vérité) est grande, de certains milieux du marché à d’autres de l’Institution, s’autorisant ainsi à avoir la seule autorité pour la transmettre .

Mais aujourd’hui ce n’est pas mon propos, je me réserve la liberté de revenir sur ce débat ultérieurement .

Regardons plutôt cette photo :

Je l’ai prise cette semaine pendant le stage des techniques mixtes . Il n’y a pas le moindre trucage, ce n’est que le reflet de l’atelier à la surface de la vitre donnant sur les arbres de la rue, ce qui m’intéressait c’était ce dialogue entre le « dedans » et le « dehors », le net et le flou, les valeurs, les couleurs et le graphisme flottants dans un espace indéfini, celui peut-être de l'abstraction …

Tout le monde aurait pu la réaliser, elle prouve combien il faut être à l’écoute du monde et de soi-même avant d’ouvrir les ouvrages de définitions pour chercher celle du mot « abstrait » . Essayer de comprendre ce que ce mot peut exprimer, et se faire une opinion ensuite seulement …

L’abstraction était donc au cœur de notre quête, même si celle-ci passait également par des travaux plus formels .

 C’est l’une des dernières toiles de la semaine réalisée sur mes conseils par Monique ASSUNÇÂO-PETIT dans un esprit vivant et informel, empreint de lyrisme et de liberté .

 

Mais ce que nous apprîmes surtout à travers les exercices que j’avais le plaisir de proposer, c’est que le champ d’une création véritable commence aux limites de notre connaissance et de nos goûts habituels, dès l’instant où l’on est conscient de ce qui s’est fait (héritage de l’histoire de l’art), de ce qui se fait aujourd’hui, et des potentialités qu’il nous appartient d’explorer .

Cultiver ses qualités d’écoute et d’éveil, être conscient qu’on n’atteindra jamais l’Absolu : exigence certes, mais pas jusqu’à l’insatisfaction maladive et totale, terrible frein à la spontanéité, la simplicité, la liberté .

 

Toile abstraite en cours de réalisation par Rose-Marie HENRI, l’un des nombreux travaux alliant matières et ransparences dont l’énumération serait trop longue, mais dont je remercie leurs auteurs pour leur enthousiasme et leurs efforts . Que les personnes que je ne cite pas et dont je ne peux présenter ici les toiles veuillent bien me pardonner car tout était très intéressant, méritoire, valable …

Pour peindre il faut commencer par oublier sa suffisance, ses préjugés, ses certitudes .

Savoir à quoi s’attendre quand on s’engage en art : épreuves de toutes sortes à commencer par celle du doute, ténacité, volonté, travail et constance . Accepter l’échec autant que les joies de la découverte, admettre la nécessité du temps dans le processus d’accomplissement individuel, toujours se remettre en question afin d’être rompu au dépassement, savoir s’émerveiller, et cultiver l’Amour et l’enthousiasme .

Quant aux personnes prétentieuses et sans véritable ouverture d’esprit, elles ne peuvent à mes yeux pas prétendre à un véritable engagement créatif, la moitié de leur « talent » étant dès le départ inexorablement gâché par cette perte d’énergie .

Une « abstraction » de Marie-Claire GRISON qui mériterai une large étude en gros plan, tant les effets de matière y sont riches et variés .

Enfin toujours se battre : pour vérifier la justesse, l’objectivité et la valeur de nos concepts, mais aussi pour défendre nos idées dès l’instant où la somme de nos connaissances, de nos expériences, de nos capacités d’écoute et de jugement nous prouvent qu’elles sont bonnes et justes, aptes à permettre à quiconque (et pas seulement à nous-mêmes) d’avancer . Alors ne rien craindre quand bien même nous serions seuls contre tous .

Grand format sans titre de Jean-Luc LASTMANN, (fin de semaine également) dont les fort intéressantes réalisations dénotent un véritable talent, empreint de force et de vitalité …

 

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7 février 2006 2 07 /02 /février /2006 23:13

Peinture, techniques mixtes

Petit article transmis loin de chez moi, à propos du stage « Techniques mixtes acrylo-vinyliques » sur toile et panneau, que j’anime cette semaine en région parisienne, thème également d’un prochain stage du même type qui se déroulera au printemps dans la région de Gap  .

Le ksar d’Aït-Ben-Addou (revu après filtrage et modifications numériques) comme exercice théorique pour apprendre à maîtriser les différentes phases d’élaboration d’une toile vivante et colorée « collant » bien au monde des images dans lequel nous vivons en ce début de 21ème siècle …

 Le ksar d’Aït-Ben-Dou : la toile terminée par Jean-Luc LASTMANN .

 Ce stage a pour but de répondre à la question suivante :

 - Comment s'initier aux pratiques de la peinture contemporaine en découvrant des techniques actuelles aux possibilités infinies ?  

 

 Très différents des stages d'aquarelle, ces stages s'adressent aux personnes motivées par l'acquisition des techniques de base actuelles d'expression sur toile, papier ou panneau, utilisant des méthodes mixtes déjà considérées comme  classiques malgré des procédés souvent novateurs, spécifiques du travail en atelier .

Démonstration sur une toile des possibilités d’expression à partir de l’un des nombreux modules .

 Ils permettent de connaître les clés pour maîtriser :

 - les effets de matières, - marouflages, - textures, - rapports acrylique/charges, - nouveaux matériaux utilisables, etc. et de réaliser des estampes contemporaines aux effets variés avec des procédés très simples …

 Effets de matière en cours d’évolution sur une toile .

 Le résultat, quoique obtenu à partir de couleurs et adjuvants acryliques est si proche des effets de la peinture à l’huile, que nombreuses sont les personnes qui n’en perçoivent pas la différence, et s’imaginent que les toiles ainsi réalisées sont le résultat d’une longue et savante maîtrise des techniques à l’huile .

Il faut dire que nous sommes ici loin des effets « criards » de la peinture acrylique utilisée sans connaissance des liants, médiums, gels, charges et autres produits lui donnant un aspect beaucoup plus élaboré, raffiné et profond que celui qui peut donner le produit de la simple couleur sortant du tube ! 

 Une toile en cours d’exécution …

 Comme la peinture acrylique et ses divers composants issus de l’industrie pétrochimique actuelle sont extrêmement solides (depuis les années quarante ils ont eu le temps d’évoluer et de s’améliorer considérablement), ont peut dire que grâce à leur nombreux avantages (temps de séchage très réduits, possibilités d’expression allant des collages aux glacis les plus subtils, extraordinaire résistance des pigments, etc.), ils sont le moyen de création adapté à la peinture actuelle : tout est possible ou presque !

 

 Explications de cours … 

 

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4 février 2006 6 04 /02 /février /2006 16:05

« Ces Merveilleux Carnets de voyages » en anglais, allemand, néerlandais …  

- Ça y est, l’excellent ouvrage de notre ami Farid Abdelouahab : « Ces Merveilleux Carnets de voyages  » (Sélection du Reader’s Digest), vient de paraître en langue anglaise, allemande et néerlandaise !

Vous trouverez dans ce livre des extraits des plus beaux carnets, (pour beaucoup inédits) choisis par les meilleurs depuis les origines de ce genre d’expression jusqu’aux plus contemporains libérés des règles académiques …

La couverture anglaise,

La couverture allemande,

… et celle des Pays-Bas .

Amis anglophones, allemands et néerlandais vous allez donc pouvoir profiter pleinement dans votre langue maternelle des textes passionnants qui accompagnent les magnifiques illustrations de ce livre .

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